Dans un monde professionnel globalisé, la dimension culturelle est plus que jamais au cœur des enjeux organisationnels. Que ce soit pour se démarquer face à la concurrence ou fédérer des équipes autour d’un objectif commun, les différences culturelles influencent profondément les comportements et les interactions.
Comme le ferait un individu, lorsqu’un groupe souhaite évaluer et améliorer sa performance, il va chercher à se comparer aux autres et à imiter ceux qui semblent avoir plus de réussite. Cependant, comme le rappelle le vieil adage, « comparaison n’est pas raison ». En effet, comparer des groupes culturels différents requiert de prendre en compte cette hétérogénéité dans la façon de penser et d’agir. Cela implique également une adaptation des outils de mesure et d’intervention pour éviter les contresens et les erreurs d’interprétation.
Retour vers la culture : un concept aux multiples facettes
Le terme « culture » est polysémique, utilisé dans de nombreux contextes : culture nationale, d’entreprise, populaire… Il fait référence à un ensemble de valeurs, de normes et de pratiques partagées au sein d’un groupe.
Dans le cadre professionnel, la culture organisationnelle a souvent été illustrée par des métaphores telles que la famille ou l’équipe sportive. Ces métaphores, bien que limitées, soulignent des éléments clés : le sentiment d’appartenance, la cohésion, la motivation, et leur lien avec la performance. La culture organisationnelle reflète très souvent la ou les cultures nationales des individus qui la composent mais elle porte aussi un objectif singulier. Il s’agit de constituer la communauté d’entreprise comme une identité distincte et de mettre en avant les valeurs et les pratiques qui font sa performance. Il s’agit également de créer un cadre commun tout en tenant compte de la diversité culturelle au sein des équipes (nationalité, genre, âge, éducation, religion, capacités techniques et fonctionnelles, …)
La « 4ème dimension » des différences culturelles
Les recherches pionnières de Geert Hofstede (1980) ont mis en lumière quatre dimensions majeures pour comprendre les différences culturelles à travers le monde. Ces axes permettent d’analyser et de comparer les cultures nationales et leur impact sur les pratiques organisationnelles.
1. Individualisme vs. Collectivisme.
Cette dimension concerne les relations entre l’individu et la société. Une culture individualiste privilégie l’autonomie et la liberté personnelle, souvent favorable à l’innovation. À l’inverse, les cultures collectivistes valorisent la cohésion et la loyauté, mais peuvent freiner la diversité et la flexibilité.
2. Distance hiérarchique
La manière dont une société accepte et distribue les inégalités de pouvoir influence le style de leadership. Une grande distance hiérarchique favorise un management directif et autoritaire. Dans ces groupes, les managers croient en l’efficacité d’instructions claires et détaillées laissant peu de place à l’interprétation et valorisent l’obéissance et la loyauté des employés. A l’inverse, qu’une faible distance promeut une approche plus décentralisée et collaborative.
3. Contrôle de l’incertitude
Cette dimension explore la manière dont une culture gère l’incertitude face à l’avenir. Les organisations avec un fort besoin de contrôle imposent des règles strictes pour contrôler les méthodes de travail et réduire l’incertitude, tandis que celles plus tolérantes laissent place à la flexibilité et à l’innovation.
4. Masculinité vs. Féminité
Les cultures dites masculines valorisent la compétitivité et la performance, souvent associées à des rôles genrés. Les cultures féminines priorisent les relations humaines et le bien-être des employés, tout en réduisant les inégalités de genre.
Quid des conséquences sur la psychologie scientifique ?
L’étude des différences culturelles a remis en question la manière d’aborder les concepts fondamentaux en psychologie. Par exemple, des recherches ont montré que l’estime de soi, longtemps considérée comme un besoin universel et uniforme, varie en fonction des cultures. Tous les groupes culturels vont tendre vers une valorisation de soi, mais en favorisant les dimensions valorisées culturellement. Ainsi, les Nord-Américains vont plutôt se valoriser sur des traits individualistes comme l’autonomie ou l’intelligence, tandis que les Japonais vont s’orienter sur des traits collectivistes tels que la loyauté ou l’agréabilité.
Ces études soulignent l’importance d’adapter les modèles psychologiques pour mieux refléter les spécificités culturelles et éviter les généralisations abusives.
Éviter les pièges de la comparaison interculturelle
Dans le monde professionnel, comparer différents groupes ou organisations est une pratique courante. Cependant, il est essentiel de ne pas tomber dans le piège des fausses comparaisons.
En effet, le premier constat de l’étude des différences culturelles c’est d’abord qu’il n’y a pas de méthode miracle, de modèle absolu de la performance en entreprise. Au contraire, les variétés culturelles induisent une variété de déterminants et de moyens pour favoriser la santé et l’engagement des employés.
D’autre part, comme nous avons pu le voir avec l’exemple de l’estime de soi, la majorité des concepts ne portent pas la même signification d’une culture à l’autre. Oublier ces différences, c’est inévitablement s’exposer à de fausses interprétations voire à des contre-sens complets.
Pour que ces comparaisons soient justes, il faut qu’elles portent un sens commun. Cela peut passer par la construction d’un étalon propre au groupe afin d’harmoniser les comparaisons internes. Dans le cas de comparaisons à d’autres groupes, il est nécessaire d’adapter finement les outils afin de s’assurer que les mots portent le même sens et que nous mesurons des objets équivalents.
Conclusion : l’enjeu des différences culturelles
La prise en compte des différences culturelles est essentielle pour comprendre les déterminants du bien-être et de la performance en entreprise. Adapter les pratiques managériales et les outils de comparaison permet d’éviter les erreurs d’interprétation et d’améliorer la santé et l’engagement des collaborateurs.
Dans un environnement de plus en plus globalisé, intégrer cette diversité culturelle est un atout stratégique pour les organisations.
Références Bibliographiques
- Guimond, S. (2010). Psychologie sociale : perspective multiculturelle. Editions Mardaga.
- Heine, S. J., Lehman, D. R., Markus, H. R., & Kitayama, S. (1999). Is there a universal need for positive self-regard? Psychological Review, 106, 766-794.
- Hofstede, G. (1980). Culture’s consequences: International differences in work-related values. Beverly Hills, CA: Sage.
- Sedikides, C., Gaertner, L., & Toguchi, Y. (2003). Pancultural self-enhancement. Journal of Personality and Social Psychology, 84, 60-79.
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